Les nouvelles zones mortes de la République –
Des banlieues aux anciennes régions industrielles
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Les nouvelles zones mortes de la République – Des banlieues aux anciennes régions industrielles
On parle beaucoup des banlieues. Du béton, des zones sensibles, de la jeunesse perdue, des fameux quartiers difficiles. Elles sont au centre du débat politique, elles brûlent, elles crient, elles protestent. Mais elles ne sont pas seules.
Il existe un autre espace de disparition, plus discret. Pas de colère, pas d’émeute – juste du vide.
Les territoires désossés de l’industrie française.
Les nouvelles zones mortes de la République.
Pendant les années de reconstruction, c’était la province qui travaillait. Elle portait la modernisation, l’exportation, l’espoir. Le charbon sortait de la mine, l’acier du haut-fourneau, le pain de la ferme.
La République reposait sur la force de ceux qui ne vivaient pas à Paris.
Aujourd’hui, elle n’y repose plus. Elle ne repose nulle part.
Elle flotte.
Ce qu’il reste du travail, ce sont des hangars sans fenêtres.
Des communes sans école.
Des jeunes sans direction.
Pas dans la cité, mais à la campagne.
À Villerupt.
À Hayange.
À Bar-le-Duc.
À Forbach.
Des villes où il y avait jadis du salaire, de la fierté, du rythme – aujourd’hui, ce ne sont plus que des points gris sur une carte, où plus aucune histoire ne s’écrit.
Elles existent encore – mais seulement dans les résultats électoraux, dans les statistiques sociales, dans les trains vides.
Ces lieux n’ont pas explosé comme les banlieues parisiennes.
Ils ont implosé.
Silencieusement.
Insidieusement.
Ils n’ont pas produit de révolte, mais de la résignation.
Leurs habitants ne votent pas par protestation – ils votent par déception.
Ou ne votent plus du tout.
Car ils savent : la République les a oubliés.
Pas comme un scandale.
Comme une habitude.
La différence avec la banlieue n’est pas seulement géographique.
Elle est atmosphérique.
À la périphérie silencieuse de la République, il n’y a pas de soulèvement – il y a de la fatigue.
Pas de feu – mais du brouillard.
Pas de bruit – mais un silence radio chronique.
Ici, il ne s’agit pas d’intégration.
Mais de visibilité.
Du besoin simple, presque enfantin, d’être compté.
L’État français a appris à gérer les problèmes des cités.
Avec la police, la prévention, l’urbanisme.
Mais pour les zones mortes de l’industrie, il n’a pas de langage.
Il n’existe aucun programme pour des fermetures sans dignité.
Aucune médiation pour des parcs industriels qui rouillent.
Aucun vocabulaire urbain pour le vide rural.
Et ainsi, cette autre face de la crise reste invisible.
Tout comme ses victimes.
Ce ne sont pas des jeunes en sweat à capuche – ce sont des grands-parents avec des souvenirs.
Des hommes avec des cicatrices du travail.
Des femmes dont les retraites ne méritent plus le mot « dignité ».
Et leurs enfants – déjà partis depuis longtemps.
Peut-être est-il temps de nommer aussi ce vide.
Il n’a ni nom, ni chaîne de télé, ni ONG.
Seulement un sentiment :
On nous avait promis que ça continuerait.
Mais ça n’a pas continué.
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La musique s’est presque tue : l’Eurovision est devenue un spectacle identitaire. Ce qui unissait autrefois l’Europe se dissout aujourd’hui en signaux lumineux.
Il était une fois une terre qui refusait de donner une réponse simple à la question de son appartenance.
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